
Depuis mars 2025, le Doyenné du Pays millavois a la joie d’accueillir, pour une année sabbatique, Frère Jean-Marc Gayraud venu renforcer opportunément l’équipe presbytérale de Millau. Originaire de l’Aveyron, et plus précisément de Belmont-sur-Rance, il renoue avec ses origines et nous fait partager la richesse d’une vie spirituelle vécue parmi l’Ordre des Frères prêcheurs.
Nous l’avons rencontré et interrogé sur différents thèmes pour faire plus ample connaissance.
- Ordre dominicain : prédication, enseignement et annonce de la Parole :
L’Ordre des Frères prêcheurs est entièrement dédié à l’annonce de l’Evangile dans des contextes aussi variés que ceux de l’aumônerie, l’université, les prisons, les hôpitaux...
Les Frères interviennent dans les Instituts catholiques et le Studium des Dominicains où se préparent les diplômes canoniques.
- Parcours religieux :
Je me suis engagé le 29 septembre 1980 chez les Dominicains de Toulouse, après une année de noviciat.
De 1980 à 1983, j’ai suivi une formation philosophique, d’abord à Bordeaux puis à Fribourg, en Suisse. Puis, de 1983 à 1987, j’ai préparé une licence de théologie à Toulouse avec un mémoire consacré à « l’Ici et maintenant de la Bonne Nouvelle. »
J’ai ensuite passé une année en Espagne à Salamanque pour découvrir et étudier la langue et la culture espagnoles.
En 1986, j’ai été ordonné prêtre au couvent des Dominicains.
De 1988 à 1991, je suis retourné à Toulouse comme responsable (Père maître) des étudiants.
Puis, je suis parti huit ans au Pérou à Cusco et Lima (de 1992 à 2000) à la demande de ma province dominicaine, pour mettre en œuvre un projet d’évangélisation et d’enseignement théologique.
Au retour du Pérou, j’ai rejoint Toulouse. J’ai alors passé l’habilitation au doctorat en théologie à l’Institut catholique de Paris.
De 2001 à 2007, à Toulouse, j’ai été, d’une part, aumônier de l’hôpital psychiatrique Gérard Marchant et, d’autre part, responsable régional du pèlerinage du Rosaire. Tout en conservant ma fonction d’aumônier en psychiatrie, j’ai été de 2007 à 2016, nommé curé de la paroisse Castanet-Tolosan.
De 2016 à 2019, j’ai été chargé de diverses activités apostoliques au couvent de Toulouse et élu, en 2019, prieur du couvent de Montpellier pour deux périodes consécutives de trois ans.
J’ai aussi été aumônier des prisons à Toulouse puis à Montpellier, de 2017 à 2025.
En 2025, je prends une année sabbatique pour venir à Millau.
- Ministère et action pastorale : faits marquants et défis religieux
Le fait qui m’a le plus marqué est la découverte du mystère du Christ ! Ce mystère se perçoit à différents niveaux :
- L’étude théologique qui permet d’approfondir le mystère, mais sans jamais l’épuiser. La cohérence et la beauté internes des paroles et des actes du Christ sont confondantes.
- La rencontre des hommes qui permet de rencontrer le Christ. Le mystère du Christ se donne à voir dans la diversité culturelle et dans les visages infiniment différents de notre humanité.
- L’inépuisable richesse de l’humanité dans ce qu’elle a de meilleur, signe de la présence du Christ chez les hommes.
Les défis auxquels j’ai été confronté sont les reconversions multiples que j’ai dû mener en fonction des cultures et des pays dans lesquels j’ai évolué.
Au Pérou, il m’a fallu quatre années pour comprendre une culture qui n’était pas la mienne et dans laquelle j’ai dû m’insérer. Il m’a fallu comprendre l’autre à partir de son propre monde, m’ouvrir à l’altérité qui est une richesse.
- Evolution de l’Eglise et de la société :
Deux mouvements s’observent à la fois :
- Un processus évident de sécularisation, plus qu’avancé.
- Un nouveau souffle de redécouverte de la foi, en particulier au travers du catéchuménat, en plein essor. Cette demande inédite de ceux qui n’ont pas ou n’ont plus de références et de repères apporte une fraîcheur nouvelle à notre Eglise. C’est un défi pour ceux qui les accompagnent ! L’Esprit souffle où il veut et il nous appartient de le discerner.
L’Eglise, en occident, cherche son nouveau visage. L’émergence d’une nouvelle configuration ecclésiale est un processus de transition qui prend du temps, peut-être des décennies...
L’interaction qui s’opère entre l’impulsion donnée par l’Autorité ecclésiale et l’implication du peuple de Dieu, dans le dynamisme de l’Esprit, est un chemin complexe semé d’obstacles, qui cherche sa voie et qui est passionnant.
Le synode sur la synodalité est au cœur de ce sujet-là. Dieu nous appelle à être, comme Église, témoins du Royaume de Dieu dans le monde. L’Eglise est ex-centrique : elle existe en vue de l’évangélisation et de l’annonce du Royaume.
- Rôle du prêtre et transmission :
Le ministre ordonné est là pour rassembler et envoyer (comparable aux deux phases du cycle cardiaque : diastole et systole).
La tendance à une forte identification pour vivre sa foi est à double tranchant : elle peut être précieuse mais aussi mener à un comportement d’exclusion de ce qui est différent. Le risque peut être de défendre plus une forme extérieure que le fond (l’Evangile).
Ce qui compte c’est d’être témoin du Royaume dans ce monde. Celui-ci est présent mais il ne germe pas sans nous.
Le message à transmettre, c’est l’Evangile ! Le prêtre est un témoin mais il doit s’effacer derrière le Témoin véritable, le Christ ! Son rôle est de montrer le Christ et d’être attentif aux impulsions de l’Esprit. Dieu est à l’œuvre dans nos vies !